Elle est née « Un jour d’été ». Mais c’est à l’ombre d’une nuit blanche que l’on retrouve Amel Bent dans « Minuit Une ». Un disque de confessions nocturnes intimes en onze coups poignants, rythmés de beaux et mauvais rêves. Chronique musicale.

Amel Bent - Minuit Une - Triste -

Une nuit au pays des mauvais rêves

Une nuit aux côtés d’Amel Bent. Une artiste la tête dans les nuages à la recherche d’un « Météore » dans la ciel. Profitant du clair de lune non pas pour dormir mais pour méditer les yeux rivés sur les étoiles. Dont celle de sa grand-mère qui au moment de sa disparition a laissé une grande part d’ombre dans sa vie bien animée. Mais c’est sans « Personne » pour la déranger, à la lueur d’une lampe de chevet éclairant sa chambre parentale qu’elle pose le décorde « Minuit Une ». Une épouse et mère démarrant son évasion au pays des rêves et tourments, le petit dernier dans ses bras, ses ainées aux côtés de son mari, tous endormis paisiblement. Contrairement à sa petite famille, Amel Bent qui ne trouve pas le sommeil clôture sa journée par une « Décharge mentale » pas de tout repos. « Minuit une, je sors de mon lit, J’vais pas fermer l’oeil de la nuit, Au clair de lune, je cherche la rime, Mais demain me donne le vertige » s’éveille-t-elle d’un air mélancolique en ce moment de solitude se transformant en véritable exutoire. Une artiste plus forte que jamais couchant ses maux sur une liste de ses failles, peurs et difficultés. Dont celle d’être la meilleure mère possible tout en conciliant avec sa carrière. Une première page ouvrant son recueil à la fois intime et thérapeutique sur lequel elle se livre tout en puissance sur ses doutes, sa famille, l’amour somnolent (« Pourquoi tu restes »), mais aussi aussi ses éclats de lumière et rêves. Une insomnie ranimant forcément quelques cauchemars. En particulier le deuil de sa grand-mère ayant fait naître cet album ainsi qu’un grand bouleversement intérieur. Avec sincérité et émotion, Amel Bent panse ses plaies tout en tentant de raviver la flamme au plus profond d’elle-même. Bien décidée à ne pas replonger la tête « Sous l’eau » noyée par le chagrin et les angoisses. « Je m’écoute à nouveau, Je crois que le ciel me fait signe » vogue-t-elle sur cette ballade intense et profonde, quelques minutes après avoir laissé couler « les larmes dans (sa) voix ». Si elle met en lumière ces instants où elle se sent « Triste », l’interprète de « Ne retiens pas tes larmes » semble désormais en paix avec sa mélancolie. « Pourtant j’ai chanté l’espoir moi, C’est écrit dans ma mémoire là » nuance-t-elle sur ce titre explicit laissant résonner sa peine, contrasté par un air lumineux et message d’espoir.

Amel Bent - Minuit Une - Mima -

Rêves d’hier et sagesse de meilleurs lendemain

Une artiste continuant à viser la lune à travers la philosophie plus mature d’une presque quarantenaire. Tout en se remémorant ses rêves d’hier dans sa chambre d’adolescente. « J’envie celle, qui dans son coeur, D’adolescente, Reste une aventurière, Marche en meute ou solitaire, Avec c’qu’il faut d’insolence » scande l’interprète de « Où je vais » sur cet hymne entêtant à l’insouciance inspiré de sa première expérience cinématographique aux côtés de jeunes, faisant écho à son hit si symbolique sorti en 2009. Une ex « Nouvelle Star » qui en plus de 20 ans dans la lumière a fait du chemin, jusqu’à devenir la propre productrice de ce disque sur lequel elle s’accorde à jouer entre diverses ambiances allant de la variété à la pop en passant par des sonorités urbaines, orientales et même rock. Une artiste gardant malgré le succès les pieds sur terre ancrés à ses racines familiales. Portée entre autre par les valeurs et la force que lui a inculqué sa « Mima » qui l’ont aidé à se relever après son décès. « Oh, j’aimerai te donner plus mais tout ne tiendrait pas sur un disque » lui adresse-t-elle sur cet hommage solaire rayonnant de souvenirs à ses côtés. Dont les réunions de famille rythmées de bons petits plats, costumes colorés et sonorités orientales. Attablée autour de sa maman donnant le la avec un « Youyou », ses filles aux choeurs et des musiciens d’Oran, où est née et repose sa grand-mère. Un pont entre les générations dont sa descendance qui comme elle avance loin de « « La norme ». « Pourquoi faut-il qu’on se ressemble, Jusqu’aux angoisses qui me dévorent, Comme si je t’avais mise au monde, Mais que je t’avais pas mise aux normes » berce-t-elle son ainée avec vulnérabilité sur un air de comptine en invitant ses trois enfants à cultiver fièrement leurs différences. Une mère se demandant malgré tout si elle joue le bon ou « Mauvais rôle », enfilant sa casquette de fille pour faire la paix avec sa maman. « Et t’es devenue la star, Toujours mon premier plan, Pour que tu te répares, J’ai fais les choses en grand » lui adresse-t-elle à coeur ouvert sur cette pépite poignante piano-voix co-signée Slimane. Avant que dans « Le sas » son réveil n’affiche « huit heures du mat’ » sonnant la fin de sa nuit pleine de tourments. Ainsi que le coup d’arrêt de ce disque qui aurait mérité de durer bien plus que 32 minutes.

L’info + : Juste avant l’enregistrement de son album, Amel Bent a participé au tournage de « Ma frère » où elle fait ses premiers pas en tant qu’actrice. Une comédie inter-générationnelle où elle incarne une animatrice de colonie en pleine questionnement sur sa vie d’adulte. Un film à l’affiche du Festival de Cannes attendu dans les salles obscures le 7 janvier 2026.

DROUIN ALICIA