Stations : éloge du mouvement en quatre temps

Syma News revient sur la performance scénique de Louise Lecavalier lors de son passage à l’Espace Cardin en décembre dernier.

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Le nouveau spectacle de Louise Lecavalier démarre dans un mouvement de bras elliptiques porté par une musique qui nous fait songer aux pales d’un rotor. Seule sur scène durant plus d’une heure la chorégraphe canadienne nous offre une danse brute et démentielle, comme elle sait si bien le faire, en tentant d’explorer ses propres limites.

Tout de noir vêtue, Louise Lecavalier prend possession du plateau dès le premier instant. Avec sa crinière blonde, son teint blafard et son corps athlétique, elle nous fait étrangement penser à Pris, la réplicante cyberpunk de Blade Runner : telle une automate créée à l’image de l’homme, elle entame avec Stations une partition à la rythmique infernale qui va être progressivement ponctuée d’accélérations, de gestes saccadés et de répétitions.

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Il y a quelque chose de tourmenté dans cette proposition quadripartite, quelque chose qui s’apparente à une fuite en avant ou à une lutte avec soi-même. Entre les oscillations de tête, les sauts frénétiques et les mouvements heurtés, Louise Lecavalier nous entraîne dans une danse quasi primitive où il ne faut chercher aucune narration. Laissez-vous juste porter sans réfléchir car le propos de Stations est autre: c’est une exploration de la scène, un dialogue avec l’espace, plus proche de la recherche artistique, du ressenti intérieur ou de la nécessité de communiquer avec son corps.

À mi-chemin entre un animal possédé et un pantin désarticulé, cette danseuse dolorosa nous impressionne une fois de plus par la mécanique de ses gestes quasi épileptiques d’où surgissent des moments de grâce et des reprises de souffle. C’est puissant, fulgurant, fluide, frénétique. On est subjugué par l’intensité de la cadence qui frôle la névrose voire la transe.

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À travers ce voyage, Louise Lecavalier nous livre non seulement un très beau moment de danse, elle nous offre aussi une vraie leçon de résistance. Du haut de ses soixante trois ans, on se demande, en effet, comment ce petit bout de femme parvient à conserver cette endurance et d’où elle puise une telle force !
You just rock Louise ! Surtout ne t’arrête pas !

Florence Gopikian-Yérémian – florence.yeremian@symanews.fr

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Louise-lecavalier-danse-dance-syma-news-yeremian-gopikian-choregraphe-spectacle-theatre-de-la-ville-paris-quebecLouise Lecavalier : Stations

Chorégraphie et interprétation : Louise Lecavalier

Assistante à la chorégraphie et répétitrice : France Bruyère
Conception lumières : Alain Lortie
Conception costumes : Yso, Marilène Bastien
Conseiller à la scénographie : Marc-André Coulombe
Musique originale et arrangements : Antoine Berthiaume
Musiques: Colin Stetson, Suuns and Jerusalem in My Heart, Teho Teardo and Blixa Bargeld
Production : Fou glorieux

Théâtre de la Ville – Espace Cardin
Du 6 au 9 décembre 2021

Tournée 2022 : Louise Lecavalier revient en France en janvier !
– le 22 janvier au Théâtre de Bressuire
– le 25 janvier au Théâtre Le Safran d’Amiens
– Le 27 janvier à Charleville-Mézières

©Photos : Massimo Chiaradia & André Cornellier

Florence Gopikian Yérémian est journaliste culturelle. Rédactrice auprès de Muséart, Paris Capitale, L’Oeil ou le BSC News, elle couvre l’actualité parisienne depuis plus de vingt ans. Historienne d’Art de formation (Paris Sorbonne & Harvard University), correspondante en Suisse et à Moscou, elle a progressivement étendu ses chroniques au septième art, à la musique et au monde du théâtre. Passionnée par la scène et la vie artistique, elle possède à son actif plus de 10000 articles et interviews.