La frontière entre le rêve et la réalité a beaucoup inspiré la philosophie ainsi que la littérature. Couplée avec la dystopie, cela donne Rengoku no Toshi, un manga seinen (pour public plus âgé) intriguant et dérangeant à la fois.

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La représentation de la violence est plutôt directe…

Le jeune Makoto est bien à plaindre : il n’arrive à dormir qu’une heure par nuit, car un même songe le réveille systématiquement. Il est se voit devant sa gare habituelle, la “S1”, sauf que celle-ci porte le nom de “Shinjuku”. Makoto comprend alors qu’il est dans une bien mauvaise posture puisque la moindre mention du mot “Shinjuku” est synonyme de mort immédiate, pas jolie à voir qui plus est.

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… et le côté sexy n’est pas moins direct!

Rengoku no Toshi n’est donc pas un manga seinen (destiné à public d’ados/adultes plus âgés) pour rien. L’œuvre est parsemé de scènes choc et le ton est plutôt érotique. Et là, le style graphique met remarquablement en valeur aussi bien la violence que la volupté. Les amateurs apprécieront, les autres seront prévenus. Le plus impressionnant reste cependant la pression exercée par le récit sur le lecteur, avec un suspense permanent sur le devenir les personnages principaux : les héros sont sans arrêt en danger, scrutés par les maîtres omniscients de ce monde factice et sans âme. Le risque de trahison est partout dans cette société où les espions sont partout, et où chacun ne voit que sont propre intérêt.

Un univers oppressant…

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C’est aussi la structure de ce monde infernal qui passionne : avec ses trains qui ne mènent nulle part, ses leaders cruels et excentriques et ses habitants lobotomisés, le Tokyo du mangaka Kyôhei Tawara est absolument glaçant. Dans son dessin, l’auteur est particulièrement doué pour montrer des plans qui marquent l’esprit. Terrifiant, ce monde n’en est pas moins complexe, car les administrateurs possèdent certains pouvoirs (contrôle de la mémoire ou des sens) pour assurer leur domination. Cela donne lieu, à partir du troisième tome, a des développements fascinants qui renouvellent encore le suspense puisque tactique et super-pouvoirs se mêlent. A chaque parution, on n’a qu’une envie : avoir le suivant dans les mains pour connaître la suite!

… mais qui évolue trop vite?

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Au 3e tome, le scénario progresse de façon très soudaine

Cependant, on peut se demander si le récit ne va pas un peu trop vite. Dans ce troisième livre, les héros connaissent déjà moyen de revenir dans la réalité. Et d’ailleurs, dans l’aperçu du quatrième, il est suggéré que Makoto y arrive déjà! Kyôhei Tawara aurait-il sous-utilisé son univers et ses mécaniques? On aurait imaginé que lutte épique des héros pour un retour vers la réalité comporte bien plus d’investigations. On est en droit d’attendre une narration plus progressive, ainsi que davantage de rebondissements et de mystères. Rengoku no Toshi est très bon dans ce qu’il fait, espérons donc qu’il ne finisse pas abruptement.

Rengoku no Toshi est donc, à la lumière de ces trois premiers volumes, un manga seinen solide par son scénario et son monde recherché, mais aussi grâce à un auteur talentueux qui n’a pas froid aux yeux en termes de graphisme. Bref, toutes les qualités d’un bon seinen, dont on a hâte de voir la suite.

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Editeur : Shûeisha (Japon)
Genre : Suspense, science-fiction
Sortie au Japon : 2019 (série en cours)

Thomas Froehlicher est chroniqueur Japon & Gaming. Rédacteur pour plusieurs sites spécialisés dans le jeu vidéo, il intervient sur l'actualité vidéo-ludique depuis trois ans. Sa passion pour la culture japonaise, aussi bien classique que moderne, l'a poussé à en étudier la langue en parallèle de sa majeure en finance, puis à effectuer un semestre d'échange universitaire à Sophia University à Tokyo. Il est titulaire du Japanese Language Proficiency Test niveau 1 depuis 2012, et depuis ne jure que par les versions originales en japonais.