90ème arrêt pour la tournée des Zéniths de Grand Corps Malade à Troyes dans l’Aube. Un spécialiste du slam qui agite les neurones et coeurs du public à coup d’art de la prose sur fond d’humour désopilant. Debrief.

Grand corps malade - concert - tournée des zénith - le cube - Troyes -
© Drouin Alicia

Un Grand Corps dans un esprit vif

Élégantes métaphores, rimes et poésie fusent tout au long du concert à la vitesse de la lumière. Le tout porté par le timbre grave de Grand Corps Malade. Un pseudo choisi par l’artiste à la béquille pour sa taille d’1m96 et son handicap n’impactant en rien sa matière grise qui tourne à plein régime. C’est donc les portes de son cerveau que Fabien Marsaud, de son vrai nom a décidé d’ouvrir sur scène de manière ludique. Un brillant auteur-compositeur-interprète enfilant pour commencer sa casquette d’auteur-scénariste-réalisateur en diffusant un court-métrage joué par deux jeunes acteurs du film « La vie scolaire » qu’il a lui-même co-réalisé. Des amis qui après avoir avalé une potion magique se retrouvent au milieu des méninges et sentiments méticuleusement rangés dans sa tête. Des « Rencontres » improbables ouvrant la voie aux différents « Chemins de traverse» parfois douloureux qu’a emprunté ce Grand Corps et coeur dans un esprit vif. Un chanteur charismatique débitant ses paroles d’un flow imparable parfaitement articulé même en cas d’imprévu. À l’instar de son titre « Pères et mères » interprété à chaud plus tôt que prévu ce soir là en raison d’un léger beug technique. Problème rapidement réparé depuis son clavier par son acolyte Mosimann, producteur de « Mesdames ». Une gente féminine qu’il a fait vaciller ce soir là à travers quelques chansons phares de l’album magnifiées par ses musiciens. Des duos virtuels plus vrais que nature avec sur un grand écran très réaliste l’énergique Suzane, les sœurs Berthollet, ou encore Louane ou Kimberose. Sans oublier Véronique Sanson incarnée ce soir là brillamment par justement la voix de Mosimann. « Derrière le brouillard » de l’esprit brumeux de Grand Corps Malade, une pluie de flash dans la salle allumés à sa demande pour illuminer un peu plus cet instant d’émotions. Un coeur tendre qui a honoré les siennes, notamment sa femme à qui il déclare son amour dans le somptueux « Dimanche soir » mais aussi sa sœur à travers le titre « Une sœur ».

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© Drouin Alicia

Jeux de mots et d’ambiance

« Elle est dans la salle » a d’ailleurs bluffé Grand Corps Malade amusé de voir quelques spectateurs se retourner pour la chercher. Un artiste taquin qui s’est plus d’une fois joué du public troyen. Un auditoire qu’il a convié à lui clamer quelques mots pour une pseudo improvisation autant rocambolesque que l’ensemble de son scénario. « Le champagne c’est une boisson que j’adore, en revanche l’andouillette c’est pas mon fort » a-t-il lancé avec dérision aux aubois qui forcément lui ont soufflé des spécialités de la Région. Avant de réitérer le même comique de répétition à deux autres reprises. Entre deux blagues, le slameur a surtout captivé la foule silencieuse fascinée par le débit et les jeux de mots raffinés de ses titres moins populaires comme « J’ai mis des mots », « Ma tête, mon coeur… » ou « Je viens de là » hommage à la Saine Saint-Denis dont il est originaire. Suivi de l’engagé « Education nationale » dénonçant l’inégalité des chances de réussite d’un quartier à l’autre. « Il y aura des déçus forcément » a plaisanté l’interprète de « Nos plus belles années » en imaginant la réaction de certains insatisfaits qui regretteraient l’absence de certains classiques notamment du très populaire « Les voyages en train ». Si personnellement c’est plutôt « Le sens de la famille » qu’on aurait adoré entendre en live, le très attendu « Mais je t’aime » a bel et bien retenti, en choeur avec l’ensemble de la salle enthousiaste. Une foule déjà débout et même une partie débarquée au premier rang prise par l’ambiance du dansant et fédérateur « Inch’Allah». « Des gens beaux » ravis mais surtout unis autour de ce hit ironique sur les dictats physiques. Un grand final finalement ponctué par le symbolique « Pas essentiel » confirmant toute l’importance de la culture et du monde du spectacle dans notre quotidien.

DROUIN ALICIA